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Le projet très controversé de mine d'or à ciel ouvert au coeur de la forêt primaire de Guyane, dans une zone particulièrement protégée en raison de sa richesse, va faire l'objet d'une inspection générale ordonnée par la ministre de l'Ecologie.
"J'ai décidé hier l'envoi d'une inspection générale sur place. Priorité sera donnée au Parc naturel régional de Guyane", a assuré mardi Nelly Olin, en précisant que cette mission partirait "très rapidement" et que les conclusions des experts seraient connues "au plus tard début septembre".
Le consortium canadien Cambior dispose d'une concession de 30 km2 octroyée par le gouvernement français à 45 km au sud de Cayenne, sur laquelle il envisage d'implanter une mine d'or à ciel ouvert, qui supposerait des carrières de 150 m de profondeur et l'utilisation de produits toxiques comme le cyanure ou le nitrate de plomb.
Selon l'Union mondiale pour la conservation de la nature (UICN) - qui regroupe Etats, experts et ONG - cette mission est "une bonne nouvelle, rassurante". "Mais si vraiment on donne la priorité à l'environnement, ce projet doit être annulé", a insisté Jean-Philippe Palasi, chargé de l'outre-mer à la section française de l'UICN. "Il est tout sauf durable et apportera peu d'argent à la Guyane en raison des nombreuses exonérations et défiscalisations réclamées par Cambior".
Le site retenu à Camp Caïman, dans la montagne de Kaw, est un site d'une exceptionnelle biodiversité qui fait déjà l'objet de plusieurs mesures de conservation: Zone naturelle d'intérêt écologique, floristique et faunistique (Znieff), réserves naturelles de Trésor et Kaw Roura et Parc Naturel régional.
Le Parc avait d'ailleurs émis début mai un avis négatif sur le projet d'exploitation qui "va à l'encontre des principes du développement durable" et "est incompatible avec la préservation et la valorisation des patrimoines naturels".
Les Réserves naturelles de France, lors de leur assemblée générale fin avril, avaient également manifesté leur "inquiétude" et leur "opposition".
Le site est notamment considéré comme le "sanctuaire des derniers caïmans noirs", abrite plus de 700 espèces de végétaux différents dont 18 endémiques, près de 100 espèces de mammifères et 254 d'oiseaux, sans compter des milliers d'insectes.
Sur ce dossier, qualifié par la ministre de "difficile et sensible", de nombreux organisations écologistes et mouvements guyanais se sont mobilisés en faisant valoir qu'outre le creusement des carrières à l'explosif, les activités minières peuvent entraîner des risques sanitaires et de contamination des sols, des eaux de surface et souterraines, notamment des cours d'eau qui alimentent Cayenne.
Dans une pétition soutenue par l'UICN, les associations guyanaises expliquent que "sur la durée du projet (7 ans), plus de 12 millions de tonnes de roches seront broyées et mélangées à 30.000 t de produits chimiques (cyanure et chaux)".
En outre, la piste d'accès à la mine traversera un territoire attribué par l'Etat à la communauté des amérindiens Palikurs pour leurs activités de subsistance.
La fédération France Nature Environnement (FNE) considère pour sa part que les études menées par le consortium canadien sont insuffisantes et réclame une expertise supplémentaire.
Cambior, qui attend les autorisations nécessaires et espère démarrer l'exploitation début 2007, projette d’extraire 34 tonnes d’or."Il y a mieux à faire dans un site aussi beau et à si faible distance de Cayenne, en valorisant l'éco-tourisme par exemple, plutôt que le détruire irrémédiablement", estime M. Palasi.